Dakar FIFAfrica 2024 : Pour une Afrique plus connectée et plus libre

FIFAfrica 2024 : Pour une Afrique plus connectée et plus libre
Dakar, Sénégal - Du 25 au 27 septembre 2024, la capitale sénégalaise a accueilli la 11e édition du Forum annuel sur la Liberté de l'Internet en Afrique (FIFAfrica), un événement phare pour la défense des droits numériques sur le continent. Pour la première fois, cette rencontre internationale s'est déroulée en Afrique francophone, un choix stratégique qui met en lumière l’importance de l’égalité d’accès à l’Internet dans cette région encore marquée par de profondes disparités numériques.
Un outil encore perçu comme un luxe
L’Internet, outil devenu indispensable dans bien des sphères de la société moderne, reste encore inaccessible pour une grande partie de la population africaine. En effet, de nombreuses régions du continent continuent de souffrir d’une couverture numérique inégale et de coûts prohibitifs. Cette fracture numérique a été un des sujets les plus débattus durant les trois jours du Forum. « L’Afrique a déjà raté le virage des autres révolutions technologiques, elle n’a pas le droit de rater celui de l’Internet », a déclaré Cheikh Fall, président d’AfricTivistes et co-organisateur de l’événement.
Les discussions ont également porté sur la liberté d’expression en ligne et les droits de l’homme, des thématiques cruciales alors que certains gouvernements africains adoptent des législations restrictives pour contrôler l’usage d'Internet. Ce contrôle renforcé, souvent justifié par des motifs de sécurité ou de lutte contre la désinformation, limite pourtant les possibilités d’une véritable démocratisation numérique sur le continent.
Les gouvernements appelés à l’action
Plus qu’un simple espace de discussion, le FIFAfrica se veut aussi un lieu de plaidoyer. De nombreux participants ont interpellé les pouvoirs publics, les incitant à s’impliquer davantage dans la mise en place de politiques publiques favorables à un accès plus équitable à l’Internet. Cyriac Gbogou, vice-président d’AfricTivistes, a exhorté les gouvernements africains à agir rapidement : « On doit comprendre que l’économie numérique peut créer de la valeur, faire augmenter le produit intérieur brut de nos pays. S’ils ne peuvent pas injecter de l’argent, ils peuvent au moins faire des plaidoyers auprès des grandes marques qui gèrent l’Internet. »
La proposition d’alléger les taxes pour encourager les entreprises à étendre leurs services numériques a été saluée, mais beaucoup ont souligné qu’il ne s’agit que d’une première étape. Au-delà des infrastructures, c’est une véritable éducation numérique qui doit être mise en place pour garantir que chaque citoyen puisse non seulement accéder à l’Internet, mais aussi en tirer profit.
Des attentes fortes pour un Internet libre et sécurisé
Les participants au forum ne cachent pas leurs attentes élevées. Pour Dominique Hodieb, consultante en stratégies numériques, « il sera important que chaque entreprise ait un responsable de politiques publiques qui travaille de façon coordonnée avec les gouvernements pour faciliter cet accès à Internet et éduquer ensuite les populations ». Elle met en avant la crainte de nombreux gouvernements face à la prolifération des contenus sur Internet, et le besoin de mieux encadrer cet espace tout en respectant les libertés fondamentales.
Cette question de l’encadrement des contenus en ligne est d’ailleurs source de tensions entre défenseurs des droits numériques et décideurs politiques. Dans certains pays africains, l’Internet est souvent utilisé pour désamorcer des crises sociales, ce qui se traduit par des interruptions volontaires du réseau ou des arrestations d’internautes. « L’Internet, au lieu d’être un vecteur de développement socio-économique, devient parfois une arme pour contrôler les voix dissidentes », a déploré un intervenant.
Un appel à l'union pour un futur numérique inclusif
À l’issue de ce 11e FIFAfrica, les acteurs présents ont réaffirmé leur engagement à poursuivre la lutte pour un Internet libre, sécurisé et accessible à tous. La feuille de route pour y parvenir semble claire : harmoniser les politiques publiques, encourager l’investissement dans les infrastructures numériques, et surtout, sensibiliser à l’importance des droits numériques.
Alors que le monde devient de plus en plus connecté, l’Afrique ne peut se permettre de rester à la traîne. Ce forum n’a pas seulement permis de mettre en lumière les obstacles actuels, il a aussi ouvert la voie à une collaboration plus étroite entre les gouvernements, les entreprises technologiques et la société civile. Ensemble, ils espèrent bâtir un Internet qui soit non seulement un moteur de croissance économique, mais aussi un outil d’émancipation pour chaque citoyen du continent.